illegal_cinema #19

La séance est proposée par Yan Ciret et animée avec Caïus Locus (Kid Loco) et Niccolo Ricardo (Nicolas Richard). 


En partenariat avec Synesthésie
. Dans le cadre du programme Résidence d’écrivains en Île-de-France, Synesthésie, plate-forme de confrontation entre l'art contemporain et les spécificités du numérique et du réseau, accueille Yan Ciret, spécialiste des avant-gardes esthétiques.

La beauté cruelle du détournement


Chroniques Soniques
, film conférence (2009) de Caïus Locus (Kid Loco) et Niccolo Ricardo (Nicolas Richard) (60 mn)
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L’Anticoncept (1951) de Gil J Wolman (extrait)
 
Adapté de leur livre monstre Les Soniques (éd. Inculte – collection afterpop), le film Chroniques Soniques prolonge le « Mode d’emploi du détournement » de Gil J Wolman et Guy Debord. Ouvertement dans une filiation post-situationniste, ils (Kid Loco et Nicolas Richard alias Caïus Locus et Niccolo Ricardo, alias Les Soniques) utilisent le film essai, sur un ton de critique encyclopédique des mœurs et des usages contemporains. L’apport expérimental de ce film est le passage du montage au mix. Les images de la culture de masse, de l’idéologie pop, sont détournées (clips, icônes rocks, pubs de la vie moderne, marchandisation mondiale) au profit d’un discours du mixage des genres. L’angle d’attaque, comme pour Wolman, réside dans la modélisation du médium, du volume sonore, de la persistance musicale, avec une ironie savante dans ce que les Soniques nomment l’ars sonica. On retrouve la même virulence politique, que celle des premiers lettristes, dans cet art des formes portées à leurs extrêmes. La force du mixage, mise au service d’une analyse critique de la société.   
 
Film pré-situationniste, L’Anticoncept de Wolman fut immédiatement interdit par le comité de censure en 1952 ; sa clandestinité allait durer une trentaine d’année. L’arrêt de la préfecture, une fois levé, ne révèlera aucune raison précise quant à cette interdiction. C’est la forme, violente, radicalement anti-cinématographique, qui fut sans doute la raison du scandale.
Il s’agit pourtant de l’un des films parmi les plus importants de l’histoire du cinéma. Projetés sur un ballon d’hélium, des cercles noirs et blancs, alternent à des rythmes stroboscopiques. Tandis qu’un texte essai, poème, biographique, scientifique, vient percuter la masse visuelle de stridences sonores. Wolman achève et dépasse tout film possible, dans le même temps qu’il revient aux origines du cinéma de Marey et Muybridge. Force physique, hypnotique, s’attaquant au système nerveux, L’Anticoncept fut conçu dans les périodes de « Dérives » entre Paris et Aubervilliers ; ville où il fonda l’Internationale Lettriste avec Guy Debord. Celui-ci écrira : « L’Anticoncept est en vérité plus chargé d’explosifs pour l’intelligence que l’ennuyeux camion du Salaire de Clouzot ; plus offensif aujourd’hui que les images d’Eisenstein dont on a eu si longtemps peur en Europe. »
 
Un extrait de L’Anticoncept sera présenté par Yan Ciret, suivi d’une discussion.


Notices biographiques

Kid Loco est musicien et producteur, issu de la scène punk et alternative, il se dirige vers des compositions hybrides venues de l’électro, du trip hop, du rock, du funk. Les mélanges qu’il opère dépassent le simple travail du sample, il se révèle un remixeur et un musicien de référence pour la scène pop (Pulp). Avec A Grand Love Story, en 1998 (réédité en 2009), il sort l’album phare, et pourtant à part, de ce que l’on a appelé la French Touch. Ne se laissant jamais étiqueter, Kid Loco bifurque vers un rock puisant dans les origines soul et blues de cette musique avec Kill your darlings (2001), puis le plus sombre et complexe Party animals & Disco biscuits (2008). Parallèlement, Kid Loco entreprend avec Nicolas Richard, un livre hors normes Les Soniques (éd. Inculte, 2009), ouvrage évènement où l’on retrouve l’érudition de tous les genres littéraires, et l’art du DJ mêlant rhétorique classique et invention formelle. 

Nicolas Richard est traducteur, notamment d’auteurs aussi importants que Philip K. Dick, Hunter S. Thomson l’un des créateur de la littérature « Gonzo » américaine, ou Richard Powers et son Le temps où nous chantions (éd. Le Cherche midi). Il a aussi participé  au scénario et traduit le Inglourious Basterds le film de Quentin Tarantino. Il fait partie des Soniques, sous le nom de Niccolo Ricardo avec Kid Loco (Caius Locus), qui publient une série de libelles et manifestes et le livre somme Les Soniques. Il vient de traduire Vice Caché de Thomas Pynchon (Fiction & Cie – Le Seuil), en 2010.

Yan Ciret, critique, essayiste, producteur à France Culture, collabore aux magazines art press, Le Magazine Littéraire, Mouvement ; il est aussi commissaire d’exposition, notamment de « Après la fin de l’art», vaste rétrospective sur les avant-gardes, au Musée d’art moderne de Saint-Etienne. Il travaille aussi avec le Centre Beaubourg (« Le futurisme à Paris, une avant-garde explosive », « Le nouveau festival », « Dreamlands »). Son dernier essai Le mythe situationniste de la ville a été publié en 2008. Dans le cadre du programme Résidence d’écrivains en Ile-de-France, Synesthésie, plate-forme de confrontation entre l'art contemporain et les spécificités du numérique et du réseau, accueille Yan Ciret, spécialiste des avant-gardes esthétiques. Il travaille à établir un point historique sur la création de l’«Internationale Lettriste» puis « Internationale Situationniste», à Aubervilliers.  Il y développe un projet global mêlant édition web et papier, expositions et recherches historiques pour montrer l’influence déterminante que ce mouvement allait connaître, jusqu’à aujourd’hui, sur les architectes, les urbanistes, les artistes et plus encore sur les modes de vie urbains.

illegal_cinema #19 au Laboratoires d'Aubervilliers © Photo M. Lericq

 

Voir aussi:
Synesthésie
Palais de Tokyo
Les Soniques
Kid Loco + Site officiel

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